La fin du règne des vaisseaux

La flotte russe de la mer Noire sous les yeux du tsar Nicolas Ier en 1849. Peinture d’Ivan Aïvazovski (1817-1900)

Un fait (relativement) peu connu : la guerre de Crimée (1853-1856) marqua la fin de la marine de guerre à voile, et donc la fin du règne des vaisseaux de ligne !

Cette fin était en fait inéluctable depuis le début de la navigation à vapeur, durant la première partie du XIXe siècle, mais elle fut accélérée par cet important conflit opposant la Russie d’un coté, l’Empire ottoman, la France et la Grande-Bretagne de l’autre. Elle se joua en plusieurs actes.

L’histoire commence ainsi : en 1853, le tsar Nicolas Ier voulant accéder à la mer Méditerranée et dépecer l’empire Ottoman, cet « homme malade, très malade », ordonne l’occupation des provinces moldo-valaques et la destruction de la flotte turque.

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Le Souverain (1819-1885)

« Dernier vestige d’un matériel séculaire, il semble être le symbole des traditions des âges qui nous ont précédés. Au milieu des transformations incessantes de notre matériel naval, peut-être n’avons-nous plus à étudier le côté technique de la marine d’autrefois ; nous avons certainement à en méditer le côté humain et à y puiser de fortifiantes leçons. L’engin de combat se transforme le personnel reste le même. Les vaisseaux de ligne, depuis le Soleil-Royal de Tourville jusqu’au Souverain d’aujourd’hui, nous ont légué un glorieux héritage de valeur, d’abnégation et de dévouement. Appliquons-nous à être les dignes fils de nos héroïques devanciers. »

Cette remarquable citation est extrait d’un intéressant article (déjà évoqué sur Trois-Ponts!) Notice historique sur le vaisseau le Souverain publié dans la Revue maritime et coloniale (tome 79, 1883), dans lequel le lieutenant de vaisseau Étienne Farret raconte la carrière des trois Souverain de l’histoire de la Marine française, dont l’important vaisseau de premier rang, mis en chantier à Toulon en 1813, mis à l’eau en 1819 et armé pour la première fois le 16 avril 1840, soit vingt ans après son lancement ! En voici un long résumé.

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L’America, premier vaisseau de la marine américaine

En octobre 1775, six mois après le début de la Guerre d’Indépendance américaine, le Continental Congress réuni à Philadelphie, désireux de doter la jeune république américaine d’une marine de guerre, forme le Naval Commitee et le charge de créer et de développer la Continental Navy, ancêtre si l’on peut dire de la fameuse US Navy. Composé de trois puis de sept membres, ce comité devient en décembre de la même année le Marine Commitee, ses attributions étant étendues à l’ensemble des affaires maritimes.

La mission du Marine Commitee est loin d’être simple. Il peut toutefois s’appuyer sur l’expérience des chantiers de construction de la côte atlantique qui, depuis un siècle, construisent des navires pour la marine anglaise, notamment marchande, ainsi que sur les marins et officiers qui ont jusqu’alors servi dans la flotte de Sa Majesté. Parmi eux se trouve le jeune lieutenant de vaisseau John Paul Jones, qui sut résumer une évidence en une formule restée célèbre : « Without a respectable Navy, alas America ! »

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Les « Soleil Royal » de la marine de l’Ancien Régime

Le règlement du 4 juillet 1670 précise : « Les seuls vaisseaux le Royal-Louis et le Soleil Royal, auront un château sur l’avant de leur troisième pont ; et à l’égard de tous les autres vaisseaux Sa Majesté défend d’y en faire aucun ». Cette règle illustre bien la volonté quasi-officielle de Louis XIV de faire du Royal Louis au Levant (Toulon) et du Soleil Royal au Ponant (Brest) des vaisseaux « hors-catégorie », les fleurons de la Marine royale.

Ayant déjà listé les six Royal Louis de la Marine française, ceci afin d’éviter toute confusion entre ces différents vaisseaux, j’entreprends aujourd’hui la même démarche avec les Soleil Royal.

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La Ville de Paris (1764-1782)

La Ville de Paris durant la bataille des Saintes, le 12 avril 1782. Détail d’une peinture de Thomas Whitcombe (1763-1824).

La guerre de Sept Ans fut désastreuse pour la France, et particulièrement pour sa marine. Dans un mémoire de 1765, le duc de Choiseul décrit l’état dans lequel il la trouva et les décisions qu’il prit pour y remédier lorsqu’il fut nommé ministre de la Marine, le 15 octobre 1761 : « Le peu qui restait dans les magasins était à l’encan, on n’avait pas de quoi ni radouber ni équiper les vaisseaux qui avaient échappé au combat de M. de Conflans. La marine devait partout, n’avait pas un sou de crédit… La finance ne pouvait rien me fournir. J’imaginais le don gratuit des vaisseaux. Je risquais ce moyen vis-à-vis des Etats du Languedoc qui se tenaient. Il réussit et de là, tous les corps de l’Etat qui, deux ans avant, avaient porté leur vaisselle à la monnaie avec réticence, s’émurent, par mes insinuations, au point que j’eus librement 18 millions de livres dans l’année pour la marine de Votre Majesté. »

Ainsi, sur les 22 vaisseaux lancés entre 1762 et 1768, 5 seulement provinrent directement du financement royal. Les 17 autres furent construits grâce aux dons des divers corps constitués qui composaient alors la France ainsi qu’à ceux des particuliers. Parmi ces vaisseaux se trouvaient deux trois-ponts : la Bretagne et la Ville de Paris.

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La Santísima Trinidad espagnole et les vaisseaux de 118 canons français

La Santísima Trinidad. Par Geoff Hunt. Le célèbre vaisseau espagnol fut capturé par les Britanniques pendant la bataille de Trafalgar le 21 octobre 1805 et sombra quelques jours plus tard, le 24 octobre 1805, durant une importante tempête.

Le vaisseau Santísima Trinidad (1769) est l’un des plus célèbres navires de guerre de l’histoire de la marine de guerre espagnole. Il est souvent dit que ce vaisseau fut le plus grand et le plus puissant de son temps. Est-ce vrai ? Rien n’est moins sur…

Comparer la taille des navires de différentes nations est un exercice complexe. D’une part parce que les unités de mesure sont nombreuses et différentes selon les pays (mètres, pieds français, pieds anglais, pieds de Burgos, etc.). D’autre part parce que chaque marine mesuraient leurs navires selon leurs propres critères. En France, la longueur d’un bâtiment était en principe mesurée de la perpendiculaire d’étrave à la perpendiculaire d’étambot, ce qui n’était pas forcément le cas dans les autres pays. Malgré ces difficultés, nous allons essayer de comparer la Santísima Trinidad et les plus grands vaisseaux français de la fin du XVIIIe et début du XIXe siècle : les fameux 118 canons de Sané-Borda.

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Qu’est ce qu’un trois-ponts ?

Il y a plusieurs mois, le marquis de Seignelay, auteur du blog Le Fauteuil de Colbert, blog traitant de la géopolitique et de la stratégie navale moderne, me contactait afin de me poser quelques questions générales sur les vaisseaux à trois ponts, et la place de ce type de navire dans les marines anciennes. L’idée était de publier mes réponses sur son site, réservé à un lectorat ne s’intéressant pas forcément au sujet.

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