Le Souverain (1819-1885)

« Dernier vestige d’un matériel séculaire, il semble être le symbole des traditions des âges qui nous ont précédés. Au milieu des transformations incessantes de notre matériel naval, peut-être n’avons-nous plus à étudier le côté technique de la marine d’autrefois ; nous avons certainement à en méditer le côté humain et à y puiser de fortifiantes leçons. L’engin de combat se transforme le personnel reste le même. Les vaisseaux de ligne, depuis le Soleil-Royal de Tourville jusqu’au Souverain d’aujourd’hui, nous ont légué un glorieux héritage de valeur, d’abnégation et de dévouement. Appliquons-nous à être les dignes fils de nos héroïques devanciers. »

Cette remarquable citation est extrait d’un intéressant article (déjà évoqué sur Trois-Ponts!) Notice historique sur le vaisseau le Souverain publié dans la Revue maritime et coloniale (tome 79, 1883), dans lequel le lieutenant de vaisseau Étienne Farret raconte la carrière des trois Souverain de l’histoire de la Marine française, dont l’important vaisseau de premier rang, mis en chantier à Toulon en 1813, mis à l’eau en 1819 et armé pour la première fois le 16 avril 1840, soit vingt ans après son lancement ! En voici un long résumé.

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De l’utilité de connaitre l’histoire de notre marine

Il arrive parfois que l’on tombe sur un texte ancien et oublié mais toujours aussi fort de sens qui nous marque et nous touche à un point tel que l’on se surprenne à le lire deux, trois et même dix fois d’affilée afin d’être bien certain d’en comprendre et d’en apprécier chaque mot. Il se trouve que je viens d’en trouver un. Publié dans la Revue maritime et coloniale en 1883 en introduction d’un article portant sur les trois vaisseaux ayant porté le nom le Souverain durant l’histoire de la Marine française, je ne peux m’empêcher de le retranscrire entièrement.

« La carrière maritime est, par excellence, la carrière de l’abnégation et du sacrifice. Elle développe les côtés les plus nobles et les plus beaux de la nature humaine. Les privations morales et physiques en sont la caractéristique en temps de paix, vivre loin de sa patrie, de sa famille, avoir toujours en face le danger et le vaincre, lutter contre les éléments déchaînés, supporter les épreuves des épidémies, montrer dans les pays les plus lointains le pavillon de la France et l’y faire respecter en temps de guerre, sillonner les mers à la recherche de l’ennemi, être à chaque minute prêt au combat, et la lutte engagée, triompher ou avoir pour linceul les flots de l’Océan. Le personnel qui arme nos navires de guerre doit donc présenter des qualités militaires et morales de premier ordre, il appartient aux chefs de les développer. Quoi de plus propre à cet effet que le tableau des vicissitudes supportées héroïquement par nos prédécesseurs ? Nous y puisons des enseignements fortifiants, car, comme l’a dit le plus illustre des marins anglais, Nelson, « rien ne vaut comme l’exemple ».

La marine, plus que toute autre carrière, a donc besoin de la tradition ; nous trouvons le fil non interrompu de cette tradition, tradition de dévouement à la patrie, tradition de discipline, en un mot tradition de l’honneur, dans l’histoire de nos guerres maritimes. A côté de cette tradition générale qui représente l’idée Patrie, il existe la tradition particulière à chaque bâtiment, qui représente l’idée Famille. Il est utile que chaque homme qui a l’honneur de monter un bâtiment de guerre, sache les faits historiques que réveille le nom écrit en lettres d’or sur le couronnement. Il s’établit ainsi entre nos prédécesseurs et nous ce lien, élément d’émulation, qui constitue la tradition de chaque navire. Nos frères d’armes de l’armée de terre l’ont bien compris : le drapeau qui, le jour du combat, brave les balles ennemies et sert de ralliement au soldat, porte, gravés dans ses plis, les glorieux états de service du régiment. Le vaisseau le Souverain a son histoire comme celle des peuples et des hommes, elle renferme des pages brillantes de succès et des pages sombres de revers. Mais nous sommes heureux et fiers de n’y constater aucune faiblesse et de proclamer que les équipages antérieurs du vaisseau le Souverain pourraient tous fixer, sans crainte, les yeux sur la devise qui a été la règle de leur conduite et qui est aujourd’hui inscrite sur le fronteau de la dunette Honneur et Patrie. »

L’auteur de ce texte est Étienne Farret, alors Lieutenant de vaisseau servant sur le Souverain, vaisseau-école des apprentis-canonniers à Hyères. Ses états de service sont disponibles sur l’Espace Tradition de l’École navale.

La fin du vaisseau trois-ponts le Trocadéro (1836)

Mis en chantier à Toulon en septembre 1813 sous le nom de Formidable. Rebaptisé le Trocadéro en 1823 en référence à la victoire française sur les révolutionnaires libéraux espagnols à Cadix, le 31 août 1823. Lancé le 14 avril 1824. Radoubé en 1833. Incendié accidentellement le 23 mars 1836 à Toulon. C’est ainsi que l’on peut résumer la pauvre et triste vie de ce vaisseau trois-ponts de type Sané-Borda.

Que s’est-il passé ce 23 mars 1836 ?

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