
Il est fascinant de constater à quel point les navires de guerre, tant par leur aspect extérieur que par leur conception et leur armement, ont pu évoluer en seulement quarante années, de la fin de la Guerre de Crimée, en 1856, jusqu’au commencement du XXe siècle. Revenons simplement quelques siècles en arrière, les vaisseaux de la marine de Louis XVIII n’étaient guère différents de ceux de Louis XIV, son arrière arrière grand-père, qui régna sur la France un siècle avant lui.
Dans son ouvrage La marine d’autrefois, l’amiral Jurien de La Gravière écrit au début des années 1860 : « La marine de Louis XIV, de Louis XV et de Louis XVI, celle de la république et de l’empire, la marine même du gouvernement de Juillet, ce ne sont pas des marines différentes, c’est la même marine à différents âges. Entre le Soleil Royal monté par le maréchal de Tourville et l’Océan monté par l’amiral Hugon, il n’y a que des perfectionnements de détail, perfectionnements que deux siècles ont été bien lents à réaliser. » Bien qu’importants pour le spécialiste, ces « perfectionnements de détail » sont effectivement invisibles pour un œil non expert, qui aura souvent bien du mal à distinguer le Royal Louis de 1667 de celui de 1814. Il est pourtant certain qu’il pourra aisément reconnaitre le vaisseau de ligne de la marine ancienne, en bois et à voiles, à coté du navire moderne, à vapeur et cuirassé. C’est ce contraste saisissant qui nous intéresse ici.
La photographie ci-dessus est, de ce point de vue, très symbolique. On y voit les deux navires les plus emblématiques de leur temps : le vaisseau HMS Victory (à gauche) et le cuirassé HMS Dreadnought (à droite). Le premier est probablement le plus fameux vaisseau de l’histoire de la Royal Navy, celui qui porta la marque de l’amiral Nelson à Trafalgar, celui qui, encore aujourd’hui, est présent à Portsmouth. Le second est le premier cuirassé « monocalibre » du monde, celui qui, dés son lancement en 1906, rendit obsolètes tous les navires de surface construits jusque là.
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